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23 mai 2018

Un virus de la même famille que celui de l'hépatite B identifié chez des chat FIV+

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

Jasper est le premier chat identifié (post-mortem) comme infecté par un nouvel Hépadnavirus, identifié en Australie et particulièrement fréquent chez les sujets FIV+ (cliché : Dre Julia Beatty, université de Sydney).
Jasper est le premier chat identifié (post-mortem) comme infecté par un nouvel Hépadnavirus, identifié en Australie et particulièrement fréquent chez les sujets FIV+ (cliché : Dre Julia Beatty, université de Sydney).
 

Chat pistonné… Au nombre du personnel de Jasper, chat noir et blanc, figurait une vétérinaire professeure en médecine féline à l'université de Sydney (Australie), la Dre Julia Beatty. Celle-ci savait que son chat était positif pour le virus de l'immunodéficience féline (FIV). Mais, en 2016, ce mâle castré de 7 ans a présenté vomissements et perte de poids. À la palpation, une grosse masse abdominale était perceptible, et une ponction à l'aiguille fine a fourni une résultat « compatible avec un lymphomes à cellules géantes ».

Lymphome

La Pre Beatty a fait euthanasier Jasper. Les analyses post-mortem ont confirmé le diagnostic (lymphome à cellules géantes, lignée B). Toutefois, un prélèvement de la masse tumorale a été inclus dans un plus large projet de recherche de virus chez les chats immunodéprimés. Cet échantillon a donc été soumis aux techniques actuelles de séquençage à haut débit des acides nucléiques. La reconstitution des génomes obtenus a pointé en direction du génome d'un virus proche de celui de l'hépatite B (entre 73 et 94 % d'homologie selon le gène considéré).

Hepadnavirus

Ce qui était curieux car le virus de l'hépatite B est spécifique des humains, et il n'y a pas de représentant connu de cette famille (les Hépadnavirus) chez les carnivores. Aussi les chercheurs ont-ils repris une partie de la masse tumorale, et l'ont soumise à une PCR capable de détecter tous les Hepadnavirus connus (ces virus à ADN double brin ont des représentants chez les chiroptères, les rongeurs et les primates). La réaction étant positive, les auteurs ont recherché les gènes de ce virus un par un, et ont confirmé qu'il s'agit d'un nouveau membre des Hépadnavirus, jamais identifié auparavant.

DCHV

Publiée le 17 mai, cette découverte – cosignée par la Pre Beatty – propose aussi un nom pour ce nouveau virus : tout simplement l'Hépadnavirus du chat domestique (DCHV). L'analyse phylogénétique en fait un franc-tireur : « il n'est apparenté à aucun autre virus, et diverge du genre des orthohépadnavirus » (< 70 % d'homologie sur le gène P), ce qui « justifie d'en faire une nouvelle espèce ». Il s'agit du premier virus de cette famille à être identifié chez une espèce de compagnie. Les auteurs ont alors souhaité vérifier si Jasper avait été virémique pour le DHCV. La Pre Jasper avait fait congeler une prise de sang datant de 2013. Une fois le nouveau virus identifié, il a été relativement aisé de réaliser une amorce pour une PCR qui lui soit spécifique. Soumis à cette PCR, le sang total de Jasper s'est révélé positif, environ 3 ans avant la détection de la tumeur.

10 % de chats FIV+

La PCR a ensuite été réalisée sur un plus grand nombre d'échantillons de sang de chats adultes australiens : 10 % des 60 chats FIV+ et 3,2 % des 63 chats FIV- étaient également infectés par le DCHV. Ce résultat n'est pas en soi surprenant : chez les humaines VIH+, la fréquence de de l'infection par le virus de l'hépatite B est du même ordre de grandeur. Toutefois, l'impact réel de l'infection par le DCHV sur la santé des chats reste à évaluer.

Ces travaux ont été conduits avec le soutien financier de la Morris Animal Foundation, aux USA. Une « étude de plus grande ampleur est en cours », préviennent les auteurs de la publication. Il conviendra aussi de vérifier si ce virus a un potentiel oncogène, à l'image du virus de l'hépatite B chez l'Homme.